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Culture / Zoom sur

“Pinocchio”, pas si enfantin…

Si la compagnie ID Proscénium s’empare de la marionnette pour proposer un spectacle empreint de poésie et d’humour, le personnage créé en 1881 par le journaliste et écrivain Carlo Collodi s’inscrit en réalité dans une tout autre veine. 

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Qui ne connaît pas Pinocchio, petit pantin de bois né de l’imagination de Gepetto et dont le nez s’allonge lorsqu’il ment ? Par le biais des studios Disney, le personnage apparaît, pour la première fois, sur les écrans français dès 1946. Si les enfants adorent et s’amusent des aventures de Pinocchio, le roman qui lui a donné naissance trouve ses racines dans un registre moins gai. Ce conte fantastique, intitulé Les Aventures de Pinocchio, parait d’abord, entre 1881 et 1883, sous la forme d’un feuilleton à épisodes dans une publication italienne pour enfants. Son acteur, Carlo Collodi, a 55 ans lorsqu’il écrit ce conte, aigri par l’insuccès de ses œuvres. Lorsqu’il adresse son premier épisode au directeur du journal, il l’accompagne d’une “dédicace” : «  Je t’envoie cette gaminerie,fais-en ce que bon te semble; mais si tu la publies, paie-moi comme il faut pour me donner envie de continuer.  » L’aventure durera deux ans et s’étalera sur 26 numéros !  

Dimension tragique

Carlo Collodi choisit de faire mourir son héros, par pendaison, après seulement huit numéros. Mais, confrontée aux protestations des petits lecteurs, la publication reprendra finalement, pour s’achever le 25 janvier 1883 avec la transformation de la marionnette en véritable garçonnet. Pour autant, Collodi n’épargne pas Pinocchio - qui signifie pignon, la graine comestible du pin parasol - successivement changé en baudet, jeté à la mer puis avalé par un requin. Devenu âne, il est ensuite acheté par un directeur de cirque pour assurer des représentations. Un artifice qui permet à l’écrivain de dénoncer le travail et l’exploitation des enfants à la fin du XIXe siècle. L’épisode de l’illusoire « pays des jouets », servant d’appât pour attirer les bambins, est révélateur.

Un récit philosophique
D’ailleurs, de nombreux metteurs en scène exploiteront le registre noir dans lequel s’inscrit Pinocchio. Évoquons le cinéaste Guillermo del Toro qui, en 2022 sur Netflix, fait de la marionnette un artefact destiné à consoler Gepetto de la mort de son fils durant la Première Guerre mondiale. Ou encore le réalisateur Matteo Garrone qui, deux ans plus tôt, signe Pinocchio, dont la tête se creuse de veinures de plus en plus profondes, à mesure qu’il échoue à embrasser la condition humaine à laquelle il aspire. On le voit, plus qu’un conte fantastique, Pinocchio est surtout une métaphore philosophique.

Par Benoît Franquebalme (Agence de presse TOUTécrit)

Pinocchio. Samedi 16 décembre de 16h à 17h30 au Mas du Mée-sur-Seine.

À partir de 3 ans. Tarifs : de 9 € à 22 €. Infos : 01 64 87 55 36.